1860 La Savoie devient française, 2010 : Elle en garde le souvenir
Livre de Jacques Lovie

1860 : La Savoie devient française – Un texte de Jacques LOVIE

Dans le contexte du 150ème anniversaire de la réunion de la Savoie à la France en 1860, l’ouvrage de Jacques LOVIE publié initialement en 1960 sous le titre de Grande et petite histoire sur le rattachement de la Savoie à la France a été réédité. J. LOVIE, ancien professeur au lycée de garçons de Chambéry (actuel Lycée Vaugelas), a été professeur d’Université et Président de la Société Savoisienne d’Histoire. C’est là qu’il rencontrera André PALLUEL-GUILLARD, ancien élève du lycée de garçons et autre éminent historien de notre région.

Vous trouverez ci-dessous la préface du livre 1860 : La Savoie devient française – 2010 : Elle en garde le souvenir signée par A. PALLUEL-GUILLARD en hommage à son maître et ami.

Pour vous procurer cet ouvrage, contacter Madame Marie-France SCHOEBEL aux coordonnées suivantes :

 

 

Préface du livre 1860 : La Savoie devient française – 2010 : Elle en garde le souvenir par André PALLUEL-GUILLARD, ancien Président de la Société Savoisienne d’Histoire, Professeur émérite de l’Université de Savoie, membre de l’Académie de Savoie.

 

Jacques LOVIE en souvenir

Je n’ai pas vraiment connu Jacques Lovie dans sa carrière professorale et académique,je ne l’ai jamais eu comme professeur au Lycée de Garçons de Chambéry,je ne l’ai pas vu faire ses recherches de thèse ni ses débuts dans l’enseignement supérieur .Et c’est seulement au milieu des années 60 qu’il prit contact avec moi pour une relation qui devait durer finalement une vingtaine d’années, intellectuelle d’abord puis progressivement professionnelle et enfin profondément humaine au point de m’avoir intimement et durablement marqué.
 
Je l’ai connu d’abord comme président de la Société Savoisienne d’Histoire et d’Archéologie dont il venait de prendre la charge et dont il venait de s’apercevoir de la nécessité d’être profondément rénovée si elle ne voulait pas disparaître. Tranquillement, sans bruit ni polémique, il en modernisa le fonctionnement (instituant l’adhésion libre à la place du recrutement sur recommandation) et le contenu en créant la revue « l’Histoire en Savoie » d’abord modeste mais promise à un bel avenir pour promouvoir une connaissance à la fois sérieuse mais néanmoins facile et plaisante du passé et du patrimoine savoyards. Ce qui est peut-être évident aujourd’hui mais ne l’était absolument pas à l’époque.
Il m’associa à la tâche sans jouer ni les prophètes, ni les promoteurs ,ni les modèles mais en toute clarté simple et plaisante d’autant que notre couple se fortifia ensuite à l’arrivée du père Lucien Chavoutier avec lequel nous avons formé un trio remarquable d’efficacité et de complémentarité .C’est avec Jacques Lovie que j’ai compris ce que devait être le mouvement associatif ,une contre –société fondée sur le plaisir de la rencontre et du dévouement pour une construction au-delà des hiérarchies officielles ,des ambitions de notables et des discours .
C’est là que j’ai vu le spectacle rare (unique ?) d’un professeur d’Université très soucieux de bonnes relations avec tout un chacun ,retroussant ses manches pour transporter des cartons pour balayer ou … convertir des imbéciles !

Il n’avait pas le talent d’éloquence d’un tribun, mais plus profondément il avait celui du contact, et aucun étudiant n’a manqué de noter cette attention du professeur pour chacun d’eux .Je me rappelle son souci des absents aux examens, qu’il était prêt à aller chercher chez eux pour ne pas leur faire manquer une épreuve. (Un demi siècle après, qui peut et sait en faire autant ?)
Le jeune enseignant fougueux et sectaire que j’étais se lamentait (discrètement) de son éternelle attention pour chercher les causes et pallier les conséquences de tel ou tel relâchement significatif  à ses yeux d’un manque (coupable) ou d’une légèreté (regrettable).

Nous n’avons pas toujours été d’accord sur les murs et l’avenir de l’institution universitaire mais il n’a jamais cherché à m’imposer quoi que ce soit, me recommandant discrètement et paternellement la patience, le bon sens et surtout en me donnant l’exemple que la vraie amitié

Enfin, ce fut un honnête homme ; la preuve en est le mépris dans lequel l’ont tenu quelques vrais faux grands seigneurs intellectuels ou universitaires de l’époque .Il en était conscient mais n’a jamais voulu répondre par quelque excès que ce fut. « Faites votre travail et ne vous occupez pas du reste qui n’a aucune importance » .Il eut pu seulement être un «  brave homme », il fut néanmoins un grand homme mais à sa manière, sans « coup de gueule », sans ambition démesurée, sans vouloir faire illusion, sans impérialisme.
Il se retira discrètement de la Société d’Histoire et de l’Université dès qu’il sentit avoir fait son temps, préférant consacrer sa « dernière étape » à un mieux être qu’à un mieux paraître.
On m’a reproché (à Paris) d’avoir accordé trop d’importance à ce « petit professeur de province »,mais outre le fait qu’il m’a fait aimer la Savoie ,qu’il m’a fait découvrir la vraie vocation humaine et sociale de l’universitaire ,qu’il m’a fait prendre conscience de la nécessité et des limites de l’engagement humain ,ce fut en fait pour moi une chance de l’avoir rencontré et connu aussi profondément ; abordant à mon tour la maturité ,la vieillesse et la retraite ,je peux d’autant plus me réjouir d’avoir pu profiter d’un tel exemple de vie .
Je ne sais s’il fut un saint ou un modèle mais peut importe… La société actuelle semble se désespérer d’avoir perdu des individus de ce genre.
On se rend compte de la valeur de certaines personnalités qu’une fois que la société en est dépourvue.